Alors, ça fait quoi d’être rentrée ? 

Voilà la question que l’on me pose constamment depuis 3 mois et 25 jours.

Ça fait quoi d’être rentrée ? D’être rentrée en France ? Soudainement ? Presque inexplicablement ? Après des vacances à Paris, après d’avoir passé un an sans la France, sans le RER B, sans les gens qui se plaignent et qui parlent du beau, du mauvais temps, sans les terrasses sur le trottoir, sans le rire du neveu lorsqu’il me voit, sans la douce présence de ma grand-mère qui s’était (presque) habituée à vivre sans moi, sans les mecs qui te sifflent dans la rue, sans le chant des oiseaux le matin, sans les différentes classes sociales qui cohabitent les unes à côté des autres tant bien que mal, sans le bruit, sans la casse, sans Hollande qui dit n’importe quoi, sans mes amis, sans ma meilleure amie.

Voilà, je suis rentrée parce que je le sentais comme ça et d’être rentrée, je ne sais toujours pas ce que ça fait. Si, au début, c’était des crises de larme le matin en ouvrant les yeux et la famille qui comprend rien, c’était les yeux embués dans le bus et des musiques qu’il n’est plus possible d’écouter, c’est des mots qui viennent en anglais, les chinois que l’on regrette, une nourriture qui manque mais c’est surtout l’euphorie. L’euphorie car c’est tout ce qu’il manquait qui devient accessible. C’est les repas de famille interminables, la conscience des ces p**** de petits bonheurs que l’on ne voyait même pas auparavant, lorsque l’on se plaignait pour un rien et que l’herbe était toujours plus verte ailleurs.

Finalement d’être rentrée, c’est la prise de conscience que j’aime la France, que j’aime Paris, que je le trouve beau avec mes yeux à moi, que j’aime l’Europe aussi. C’est des projets de repartir un jour bien-sûr en m’étant enrichie de ce que je peux trouver là maintenant. Ce n’est pas difficile pour moi, vraiment pas, j’ai grandi. J’aime être expatriée, j’aime Hong Kong mais la richesse d’être revenue pour honorer ce pays d’une manière ou d’autre autre n’a pas de prix.

J’ai laissé la bulle dorée derrière moi. J’ai laissé des instants magiques que je ne vivrai JAMAIS en France, je le sais. J’ai laissé la liberté absolue, le grand Walt Disney World, les rencontres inattendues, l’appartenance à une communauté insouciante, l’effervescence… Et pourtant, souvent à la fin, j’avais mal lorsque je me réveillais le matin…  Parce que plaisir ne veut pas dire bonheur, parce que, peu importe son intensité, le plaisir est éphémère  et le bonheur manque… En tout cas, à moi, il me manquait. Être expat’ à Hong Kong, c’est la possible désociabilisation si la discrétion dans les sorties se fait sentir, c’est « soit heureux et tais-toi », c’est la finance et les salaires 6 fois supérieurs qu’en France, c’est tes potes qui partent en voyage tous les weekends et la petite voix qui te dit « ne te compares pas », c’est des « up » exaltants, des « down » renversants, des « Je t’aime » tout le temps, des contrastres psycologiques et la dérive, la dérive face au vice, face au fric, face aux pertes de repères. Il y a les gens qui partent aussi… Ceux auxquels tu t’attaches. La famille que tu dois reconstruire, les visages qui changent parce que c’est d’autres personnes ou pire : parce que c’est d’autres états d’esprit.

Cette dérive… Cette dérive qui fait qu’aucun jour ne ressemble au précédent, cette dérive qui devient dopante, comme une drogue, l’absence de routine… Mais n’est-ce pas ce qu’il y a de plus magique ? Ne jamais savoir de quoi demain sera fait, avancer comme un petit cheval, se tromper de case, reculer, en sauter deux, en sauter trois, reculer une nouvelle fois. La vie à Hong Kong, c’était ce jeu dont nous n’avions pas les règles, c’était cette douce folie et cette perte de repères, et c’était grâce à Lui que je gardais la tête au dessus de l’eau, à cause de Lui que je plongeais aussi.

Mon Hong Kong c’était ça : cette absence de routine, toute cette joie, ces hauts et ces bas. À nous de démêler tout ça. Bref, ça fait ça d’être rentrée, c’est vraiment aucun regret puisque rien n’est comparable. Hong Kong, c’est le quart de ma tête, les trois-quart de mon coeur, parfois l’inverse. Hong Kong, ça m’a (re)déclenché cette folie douce au fond de moi qui me poussera à repartir un jour, ici ou ailleurs, je le sais. Mais c’est aussi réaliser que, pouvoir profiter des siens ici, c’est une richesse que je ne veux plus oublier, plus jamais.

Cet article est extrêmement personnel, il est ma réalité à moi. À ne surtout pas prendre pour généralité… 😉

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8 commentaires sur « Alors, ça fait quoi d’être rentrée ?  »

  1. Eh eh tu te doutes que cet article me parle énormément… C’est magnifiquement bien écrit. Le challenge, le vrai, c’est d’arriver à se construire un présent heureux mais sans toutes les outils dont on bénéficie quand on est expat. Réapprendre à avoir le coeur qui bat grâce aux petits bonheurs du quotidien c’est un vrai exploit. Bravo à toi pour cet effort que tu fais pour être heureuse en dépit de ta sortie de cette « bulle dorée » comme tu la nommes.

    Plein de bonheur à Paris.

  2. Très bon article qui résume fidèlement à mon avis le sentiment de nos expatriés compatriotes. Entre la possibilité de vivre un rêve éveillé au quotidien et le mal du pays qui incite à revenir dès qu il y a un petit ( ou gros) coup de blues..

    Je suis allé rendre visite à 2 de mes amis en Australie et au Panama et c est clair que les petits plaisirs du quotidien manquent cruellement.. Exemple banal mais vital que celui de la nourriture ; que ne feraient ils pas pour un bon saucisson, un bon fromage et une bonne baguette franchouillarde !

    D accord avec le manque de repère qui peut menée malheureusement à des excès excessifs,mais aussi avec ce pouvoir d achat et les tentations qui en découlent qui peuvent rapidement faire tourner la tête.

    Après concernant Lui ou Elle, c est clair que ça peut aider à garder la tête froide,ou pas ! Mais peu importe le pays finalement! 😉

    1. C’est clair… Heureusement, j’avais quelques piliers dont ce Lui dans mon article mais parfois ça ne suffit même plus… Être expatrié, c’est un tiraillement constant et surtout lorsque l’on est proche de sa famille. J’en ai connu également beaucoup qui n’avait aucune attache spéciale en France… Ceux-là vivent l’expérience totalement différemment ! Bref, nous pourrions en parler des heures 🙂 merci de me lire en tout cas Jeebs !

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